Opéra(tion) Woody Allen

Ci-dessus, les dessins du sarcophage du magicien par Yves Moreaux pour la séquence du théâtre berlinois de Magic in the moonlight. Photogrammes de la séquence en diaporama, ci-dessous. Le tour de magie avec l’éléphant fut entièrement réalisé aux Studios de la Victorine puis inséré par effet spécial sur la scène du théâtre en post-production. Les extérieurs et intérieurs du théâtre sont ceux de l’Opéra de Nice.

Arnaud Duterque, responsable de production pour le cinéma et la télévision, récemment pour Mascarade de Nicolas Bedos et la série de Neil Jordan Riviera, a publié en 2020 « Magic Woody Allen – Journal d’un tournage sur la Côte d’Azur » (Éditions de l’Antre), d’après des notes prises par l’auteur durant les repérages et le tournage de Magic in the moonlight (2014) de Woody Allen, film pour lequel il avait été engagé. Morceaux choisis du livre se déroulant à Nice rue Saint-François-de-Paule

Mercredi 19 juin

« Nous reprenons nos voitures (…) pour descendre vers Nice, nous avons rendez-vous, juste pour une petite visite presque à l’improviste à l’Opéra de Nice. La responsable des autorisations de tournage pour la Ville de Nice, nous attend de pied ferme pour faire la visite, nous sommes en retard comme d’habitude. Elle nous prévient, on ne peut pas tourner la moindre scène à l’opéra de Nice car il doit fermer pour effectuer des travaux de mise aux normes de sécurité cet été, en plein pendant la période de notre tournage. Woody Allen n’en a cure, il s’en soucie comme d’une guigne, car il n’est pas du tout au courant de ce léger problème et on entre. On déboule en pleine répétition d’un spectacle de petites filles qui dansent en tutu, personne n’a vraiment été prévenu, devant le débarquement de l’équipe, la répétition s’arrête… Les mères médusées voient Woody entrer à l’intérieur dans la grande salle de l’Opéra qui est somptueuse. On allume les lumières, pour que l’on puisse admirer le décor. Les mères médusées manquent de se pâmer : « Tu as vu c’est Woody Allen incroyable non ? » Il est séduit par la grandeur et l’élégance des lieux, veut absolument tourner à l’Opéra de Nice, la responsable des autorisations se gratte la tête avec le régisseur général qui sort son baratin habituel pour la persuader. » (pp. 42-43)

Vendredi 12 juillet

« L’opéra, (…) après plusieurs refus polis, a finalement accepté le tournage (…) A l’intérieur, il y a, ce soir, une grosse séquence à tourner avec 200 figurants, qu’il faut préparer, habiller, maquiller, coiffer dans un temps record. Nous sommes en plein été, il y a soudain une panne de clim dans l’Opéra en travaux, il ne fait pas loin de 60 degrés ! Toute l’équipe est au bord de l’explosion, et n’est pas loin de démissionner, il faut rapatrier de toute urgence des climatiseurs. L’équipe de la régie s’en occupe et se débrouille pour rapatrier les climatiseurs utilisés sur les plateaux du studio de la Victorine. Il y a un journaliste infiltré à l’intérieur de l’Opéra, il interroge les différents figurants qu’il croise, lui-même s’est inscrit sur la liste de la figuration. Les figurations qui ne savent rien, racontent n’importe quoi et le pseudo reporter fait ce qu’il faut pour rendre son reportage intéressant, car il est diffusé le soir même à la radio ! A l’extérieur, cela devient beaucoup plus compliqué qu’à l’intérieur. En effet, au-dehors la foule devient dense et presque hystérique, car elle cherche à tout prix à apercevoir la légende de New York. Mister Woody Allen. La police municipale représentée en l’occurrence, par deux jeunes femmes charmantes appellent des renforts masculins, mais cela ne suffit pas, il faut mettre des barrières antiémeutes pour contenir la foule, qui se fait plus compacte, plus pressante, presque agressive.

Pendant le changement de décor entre l’intérieur et l’extérieur, toute l’équipe est partie dîner sur la place Pierre Gautier, au cœur de la vieille ville. Loin de l’agitation et de l’effervescence, le maestro lui se restaure dans l’un des meilleurs restaurants de la ville, le genre d’endroit où les serveurs et la patronne regardent les clients de haut. D’un peu trop haut peut-être. D’ailleurs, monsieur Allen part du restaurant avec la productrice sans payer, car ils ont attendu l’addition pendant plus d’une demi-heure ! Le problème de ce restaurant c’est que la patronne est persuadée d’être plus importante que ses clients. En pleine scène, débarquant comme les cheveux sur la soupe, le Maire vient serrer la pince au petit Prince du cinéma, interrompant le tournage pendant un bon quart d’heure. ‘Time is money‘ et le compteur tourne ! La productrice fait la gueule. Il lui remet une affiche du festival de jazz de Nice, qui se joue à deux pas de là signée par tous les artistes… et une petite chaise bleue symbole de la promenade des anglais… Fin de tournage une heure du matin, remballage jusqu’à 2h15. » (pp. 58-59) ♦

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